Le Nouvelliste (Suisse) – Mai 2021 – Diane cause de son habitat

« CETTE MAISON A L’ODEUR DE LA MONTAGNE »

EXCLUSIF Depuis cinq ans l’artiste québécoise s’est installée dans une maison Minergie à Ayent, une maison qui lui ressemble, pleine de musique, de photos, d’art. Une maison joyeuse et inspirante.

Par Didier Chammartin

Diane Tell nous accueille, radieuse, depuis la terrasse de sa chambre. Radieuse, parce qu’il fait beau en cet après-midi de février et que déjà le printemps s’est annoncé dans les champs environnants.

Radieuse et accueillante, ce sera le «tu» tout de suite pour elle. «Tu sais, devant chez moi il y a un immense champ de tulipes de montagne (la commune d’Ayent abrite la dernière colonie de Suisse de tulipes sauvages, tulipa sylvestris. ndlr). C’est une fleur rare et protégée. Les promeneurs viennent les admirer entre mars et avril. Il ne faut pas les cueillir, d’ailleurs elles ne vivent pas bien une fois coupées.»

On l’a compris, la chanteuse est amoureuse de la nature. Certainement ce qui l’a conduite en Valais au fil de sa carrière. «J’ai vécu au Canada, à Paris, à New york, à Biarritz… mon projet était de changer de vie. Habiter en Suisse c’était réaliser un rêve d’enfant. J’ai toujours eu une émotion très forte auprès des montagnes, que ce soient les Rocheuses ou les Alpes. Je ne voulais pas habiter en station mais dans un vrai village. Alors, Je suis allée sur internet, ai pris une dizaine de rendez-vous. Le coup de coeur fut pour celle qui était encore en construction.»

C’était il y a maintenant cinq ans et le coeur vibre toujours. «L’intérieur des parois est conçue avec de la laine de bois, un isolant écologique et naturel très performant. Ce matériau présente d’excellentes qualités d’isolations thermique et acoustique et la surépaisseur des murs permet d’éviter une installation de chauffage», explique-t-elle. Une maison sans chauffage? «Elle est tempérée à la manière d’un puit canadien où l’air se réchauffe, passant dans des conduits qui l’amène sous terre et remonte dans le bâtiment.

Ici c’est un peu le même système mais les tuyaux restent dans les murs. Ce qui fait que la maison est très saine et reste fraîche en été. Mais je n’ai rien décidé, elle est l’oeuvre de l’architecte Serge Aymon.»

L’AUTONOMIE DE LA MAISON

L’architecte a conçu l’ensemble du bâtiment labellisé Minergie-P. La maison se structure par une charpente à fermes et une façade en retrait, le balcon couvert permet aussi de conserver une certaine fraîcheur, les pièces n’étant pas exposées en plein soleil. Ajoutez un triple vitrage, des panneaux photovoltaïques, des panneaux solaires, une cuve solaire et un appoint par une batterie d’eau sur l’aération contrôlée. Et la maison devient autonome.

Conçue sur deux étages, elle abrite au rez la chambre d’ami et le bureau de Diane Tell. Ici, l’artiste s’occupe actuellement de placer les différents éléments composant le vinyle «Haiku » son dernier album. «Il y a dix-huit illustrations différentes, chaque disque en contient deux, avec une photo, les notes d’accompagnements, les chansons en français et leur traduction en anglais.»

L’AUTONOMIE DE L’ARTISTE

Comme pour l’énergie de sa maison, Diane Tell vise l’indépendance en musique. «Cela va de l’écriture des chansons, de la collaboration sur les titres, à la production, réalisation, fabrication et jusqu’à la distribution. J’ai un côté très artisan. Aujourd’hui j’ai envie de me spécialiser dans ce travail luxueux.» Comme on publie un beau livre, on peut produire un beau disque. Et le beau artistique est partout chez elle.

En montant à l’étage, nous sommes accueillis par des notes de jazz. «Parce que c’est plus sympa pour faire des photos!», sourit-elle. L’installation sonore confine à la perfection, colonnes Jean Maurer JM 370 F, amplificateur à lampe Lectron JH32… «Cela n’a rien à voir avec le son d’enceintes bluetooth». Oui, on peut difficilement mieux. «La musique est en permanence chez moi, du petit matin jusqu’au coucher. J’en écoute toute la journée je répète ou je compose. J’ai créé mon dernier album «Haïku» ici. Je viens de composer neuf nouvelles chansons en quinze jours. L’endroit m’inspire. C’est un état d’esprit, mais certainement que la maison y contribue. Je m’y sens comme protégée. Il y a quelque chose d’extraordinaire d’assister aux différentes luminosités tout au long de la journée; la grande pièce du séjour est un peu comme un observatoire protégé.»

ET DES SOUVENIRS INSPIRANTS

Un séjour que Diane Tell a décoré de ses multiples vies. «Beaucoup d’objets viennent de mon passé lointain. Le fauteuil est celui du grand père, restauré avec du velours vénitien déniché dans un magasin où Marcello Mastroianni venait chiner. Le canapé en structure de bambou et ses lanières de cuir, je l’ai depuis mes 18 ans. Le banc et les chaises sont des meubles de bistrot Merveille du XIXe siècle.» Et des livres! Nietzche, Rilke, Karoo, une autobiographie de Neil Young, Roland Barthes… des livres de photographies. «J’en ai énormément. Tous ne sont pas ici, je pourrais ouvrir une bibliothèque de village!»

Sur les barres qui relient les deux murs du séjour, Diane Tell a disposé des objets décoratifs et gais. Une lampe singe y grimpe, puis des camions rouges, des taxis Newyorkais, un chapeau de cowboy miniature en guirlandes festives. Aux cimaises, des tableaux de Muriel Abadie, de Koldobika Jauregi encore, une toile de Tanobé, une peintre japonaise. Partout ses photos, beaucoup de photos, une autre passion de Diane Tell. Tirages argentiques, polaroïds, diapositives, numériques… «A quatorze ans mon premier métier fut photographe pour Salomon Dynastar», nous avoue-telle.

Photos, musique, livre, peinture, «cette maison est une extension de mon être. C’est un pur bonheur de l’habiter, presque un ermitage ensoleillé. C’est une maison de poupée, très féminine. Et les Valaisans sont très accueillants!»